Marque sonore : une première en Chine !

Elle se faisait attendre, voilà qu’elle arrive : d’après l’information donnée par la SAIC (State Administration of Industry and Commerce) le 13 février 2016, la demande d’enregistrement d’une marque sonore a été acceptée en Chine pour la toute première fois.

Cette demande a été déposée par China Radio International le 4 mai 2014, soit trois jours après l’entrée en vigueur du dernier amendement de la Loi des marques qui permet expressément l’enregistrement d’une marque sonore.

Cette marque désigne les classes 35 (publicité, gestion des affaires commerciales), 38 (télécommunication), 41 (éducation, formation, divertissement) et 42 (services scientifiques et technologiques). La description de la marque comprend à la fois une représentation graphique (une portée musicale) et une description textuelle. Une version audio de 40 secondes est également disponible.

Les statistiques montrent que jusqu’à la fin janvier 2016, 450 demandes d’enregistrement de marques sonores ont été déposées au CTMO (China Trade Mark Office).

Face à ce genre de marque qui ne repose plus sur la vision, comme c’est le cas des marques « classiques », mais sur l’ouïe du consommateur, la SAIC a pris soin de définir les critères d’examen (de forme et de fond) des marques sonores dans un document administratif déterminant la procédure d’examen du CTMO.

Ce document confirme la possibilité d’enregistrer les sons musicaux ou non musicaux, et précise la description nécessaire à travers des exemples concrets. Il est également rappelé que l’examen du CTMO porte sur le caractère distinctif du signe qui, pour les marques sonores, s’acquiert généralement par l’usage.

Cet enregistrement de marque sonore est peut-être le premier d’une longue série en Chine. En Europe, le nouveau Règlement sur la marque européenne qui supprime la condition de représentation graphique pour une marque va peut-être également permettre d’admettre plus facilement l’enregistrement de marques sonores.

 Article rédigé par Yi QIN, du cabinet LLRllr_new

La Chine, le vrai moteur de croissance en PI

La Chine ne fait pas parler d’elle uniquement pour sa croissance en termes de brevets. Selon le « Rapport annuel de marques » publié par Thomson Compumark fin décembre 2015, avec plus de 1,7 millions de nouvelles marques, la Chine a vu son taux global de croissance de marques enregistrées bondir de 71 % en 2014, occupant toujours la place leader parmi 186 registres dans le monde.

Les classes les plus demandées dans le pays restent les classes 25, 29, 30, 35 et 43, relatives aux produits et services en rapport avec les vêtements et les aliments.

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En route vers les véhicules électriques en Chine !

D’ici 2020, la Chine est destinée à devenir le premier marché de véhicules électriques au monde. Pour les acteurs de l’industrie automobile, cette perspective représente une échéance à ne pas rater. L’analyse des brevets en Chine, dans le domaine de la voiture électrique, depuis le début des années 2000, montre que les acteurs chinois se démarquent de leurs concurrents internationaux par leurs choix technologiques, privilégiant notamment les batteries rechargeables par rapport aux piles à combustible, comme ressources embarquées.

5 millions de véhicules électriques d’ici 2020, tel était l’ambitieux projet du gouvernement chinois lancé en 2010 afin de permettre une réduction significative du CO2 rejeté dans l’atmosphère. Cet objectif apparaît comme étroitement lié à l’analyse faite par le ministère chinois de l’environnement, révélant que « 90 % des villes chinoises dépassent les seuils de pollution considérés comme sans risques par l’OMS ». En dépit d’un objectif chiffré revu à la baisse, pas moins d’un million de véhicules électriques est attendu sur les routes chinoises en 2020, faisant ainsi de la Chine le premier marché mondial pour les voitures électriques.

voiture1. Qu’est-ce qu’un véhicule électrique ?

Un véhicule électrique est, par définition, un véhicule qui n’utilise qu’un moteur électrique pour se mouvoir, contrairement aux véhicules thermiques ou hybrides qui embarquent toujours, au moins, un autre moteur, le plus souvent thermique.

full electric L’énergie nécessaire au fonctionnement des véhicules électriques, c’est-à-dire à l’actionnement du moteur électrique, provient de ressources embarquées capables de fournir et/ou de stocker de l’énergie électrique. L’énergie embarquée, pour ce type de véhicules, provient très souvent de batteries rechargeables, même si ces dernières n’assurent pas encore une autonomie suffisante pour les longs trajets. Il existe également des alternatives moins fréquentes pour la fourniture de cette énergie, telles que les piles à combustible, qui présentent l’inconvénient de nécessiter un réservoir pour stocker la source d’alimentation de la pile (e.g. hydrogène, méthanol), ou les super-condensateurs, qui ne possèdent qu’une capacité de stockage réduite par rapport aux batteries. Bien entendu, des combinaisons de ces ressources embarquées sont également possibles.

Afin d’atteindre l’objectif annoncé, la Chine, par l’intermédiaire de ses industries et de ses universités, s’intéresse à tous les composants de la voiture électrique, et tout particulièrement aux moteurs et aux batteries, délaissant quelque peu les piles à combustible qui semblent représenter une solution pour un horizon plus lointain. De ce fait, pour les acteurs locaux, l’accent est clairement mis sur les « battery electric vehicles » (BEVs) et sur les « plug-in hybrid electric vehicles » (PHEVs).

2. Quelques données brevets illustrant le projet chinois

Du point de vue de la propriété industrielle, le gouvernement chinois avait fixé comme objectif d’atteindre 3000 titres chinois (brevets, dessins et modèles d’utilité confondus), détenus par des entités chinoises, d’ici 2015. D’après une étude McKinsey (1), cet objectif a été atteint et même largement dépassé à hauteur de 164 %, à la fin du premier trimestre 2015.

Par ailleurs, s’ajoute à cet ambitieux projet l’ouverture aux entreprises étrangères d’un marché jusqu’ici réservé aux constructeurs nationaux. Il n’est alors pas surprenant de constater, sur les dix dernières années, une augmentation significative du nombre de dépôts sur le territoire chinois de demandes de brevets liées au diverses technologies présentes sur les types de véhicules mentionnés. Cependant, une très grande majorité de ces dépôts est à mettre à l’actif d’entreprises étrangères, désireuses de s’octroyer les places de choix pour ce nouveau marché aux perspectives très intéressantes.

Regardons de plus près l’exemple des dépôts de brevets en Chine concernant les technologies relatives aux moteurs électriques pour ces véhicules. D’après une étude du « German Aerospace Center (DLR) – Institute of Vehicle Concepts » (2), la Chine est le pays qui connaît, dans ce domaine, la croissance la plus importante sur la période 2000-2012, notamment depuis 2010, passant ainsi d’une dizaine de demandes de brevets à plus de 3000 en 2012. Ces chiffres sont à corréler avec l’origine des déposants dans ce domaine technologique qui sont en grande majorité étrangers. En effet, l’analyse des entreprises les plus inventives dans ce domaine révèle que, non seulement les entreprises japonaises comme Toyota, Honda ou Nissan conservent leur position de leaders mondiaux, mais également que les premières entreprises innovantes chinoises, à savoir Chery Automobile and BYD, sont très loin derrière.

Sur le plan des technologies des ressources embarquées, une grande majorité des acteurs mondiaux de l’automobile, comme Toyota, a opté pour le développement des technologies relatives aux piles à combustible et a, par conséquent, acquis un portefeuille de brevets traduisant cette volonté, y compris en Chine où Toyota détenait fin 2012 plus de 700 brevets pour ces technologies. L’avance prise par Toyota d’un point de vu mondial, sur cette technologie, l’a même amené en début d’année 2015 à imiter la société Tesla qui, comme elle un an auparavant, avait rendu accessible à la concurrence une partie de son portefeuille de brevets, dans un but annoncé de ne pas favoriser le développement des technologies protégées par les brevets concernés. Un tel geste n’a cependant pas dû énormément intéresser les acteurs chinois qui, comme expliqué précédemment, ont préféré focaliser leurs recherches sur les technologies des batteries rechargeables, une focalisation qui est relevable lors de l’analyse de leurs brevets.  batterie

A la différence de la technologie des piles à combustible, pour laquelle les acteurs chinois sont bien loin de leurs concurrents japonais et sud-coréens, les constructeurs automobiles chinois apparaissent comme des leaders en matière de BEVs. En effet, quatre d’entre eux (BYD, Chery, Changan et Geely) possédaient, fin 2012, les quatre portefeuilles de brevets les plus importants en Chine relatifs à ces technologies, reflétant ainsi l’option prise quelques années auparavant (3).

Conclusion

Afin de répondre au défi lancé par le gouvernement chinois et ainsi de s’octroyer une place de choix d’ici 2020 dans ce nouveau marché chinois de la voiture électrique, l’industrie automobile chinoise a fait des choix différents de ceux de la grande majorité de ses concurrents internationaux, concernant notamment les technologies liées aux moteurs et aux ressources embarquées, acquérant, par conséquent, des portefeuilles de brevets tout aussi différents. Les (cinq) prochaines années révèleront si ces choix étaient les bons.

 

(1) « Supercharging the Development of Electric Vehicles in China » – McKinsey-China_Electric-Vehicle-Report_April-2015-EN-1

(2) « Patent Landscape of Electric Machine Technologies for Electric Mobility » – EVS28 KINTEX, Korea, May 3-6, 2015

(3) « The research on technological innovation of Chinese automobile industry based on patent mapping » – Advances in Services Science and Services Information Technology (Set)

Chine : le Conseil d’État encourage la protection de la propriété intellectuelle

Le Conseil d’Etat chinois confirme la volonté du gouvernement chinois de poursuivre la construction de son système législatif de protection de la propriété intellectuelle. Il annonce les prochains développements en ce sens : savoir-faire, variétés végétales, politiques d’incitations fiscales à l’innovation, sanctions accrues en cas de litige, amélioration des procédures et contrôle des abus de position dominante sont au programme.

Le 22 décembre dernier, le Conseil d’État chinois a publié un avis sur la construction du système de protection de la propriété intellectuelle dans les prochaines années. 

Dans cet avis, le Conseil d’État chinois invite le pays à obtenir, d’ici 2020, des résultats concrets dans le domaine de l’amélioration de l’entrepreneuriat et de l’innovation, afin d’obtenir un avantage dans la compétition mondiale en matière de propriété intellectuelle.

4 axes de développement, 5 mesures essentielles

A cet effet, le Conseil d’Etat chinois évoque quatre axes de développement, à savoir le pilotage stratégique, la réforme et l’innovation, l’orientation vers le marché et une approche plus globale.

Ces axes passeront par cinq mesures essentielles :

– la promotion de la réforme dans l’organisation de l’administration de la propriété intellectuelle,

– le maintien d’une protection ferme de la propriété intellectuelle,

– la promotion de la propriété intellectuelle,

– la consolidation de la propriété intellectuelle au niveau international par le biais de la prévention dans des industries clef, et enfin

– l’amélioration continue dans la coopération internationale en matière de propriété intellectuelle.

Recommandations du Conseil d’État

De façon plus concrète, le Conseil d’Etat chinois recommande notamment d’agir dans les domaines suivants :

Savoir-faire : il recommande de légiférer encore davantage dans le domaine du savoir-faire, de manière à protéger ce savoir-faire dans le cadre de la mobilité salariale et de la coopération technologique inter-entreprises.

Variétés végétales et indications géographiques : le Conseil d’Etat chinois appelle de ses vœux la construction d’une législation au sujet des variétés végétales, ressources génétiques et du savoir-faire traditionnel. Une législation spécifique sur les indications géographiques est attendue (voir notre article pour des précisions à ce sujet).

Politique d’incitation fiscale à l’innovation : il est question de mettre en place un programme de déductions fiscales en matière de recherche et développement – un crédit impôt-recherche à la mode chinoise ?

Dommages et intérêts dans les litiges en contrefaçon : la volonté d’augmenter les sanctions est à nouveau réitérée (voir notre article à ce sujet). Le Conseil d’Etat chinois appelle également à un renforcement de la coopération internationale dans les affaires pénales liées à la propriété intellectuelle.

Amélioration des procédures de dépôt et d’examen : une incitation au dépôt électronique par la simplification des procédures est jugée souhaitable, de même que le développement des programmes du type PPH (Patent Procecution Highway).

Abus de position dominante : le Conseil d’Etat chinois appelle à développer une législation permettant de punir les éventuels abus des propriétaires de brevets essentiels et les comportements d’attribution de licences pouvant entraver le droit de la concurrence.

Encore une fois, la Chine, par l’intermédiaire de cet avis rendu par son Conseil d’Etat, affiche sa volonté de devenir une puissance incontournable dans le monde de la propriété intellectuelle en s’alignant sur les législations existantes dans les pays occidentaux, tout en affichant clairement son attachement à ses particularités régionales.

 

Brevets et innovation pharmaceutique en Chine

Voici un panorama de l’innovation pharmaceutique en Chine, stimulée par le gouvernement chinois qui favorise entre autres la mise sur le marché de nouveaux médicaments et leur protection par brevet.

médicaments
Les Directives du SIPO autorisent, lors de l’examen de brevetabilité, la prise en compte de résultats expérimentaux fournis après le dépôt de la demande.

Selon un rapport de l’institut Mc Kinsey d’octobre 2015 (The China effect on Global Innovation), la moitié des objectifs annuels de croissance du PIB de la Chine ne pourront être atteints que par l’innovation (soit 2 à 3% sur les 5,5 à 6,5% visés).

L’approche de la Chine a évolué de façon spectaculaire ces dernières années dans le domaine de l’innovation, puisque par exemple le pays est devenu le 4ème déposant de brevets en Europe, avec une entreprise chinoise se classant au 5ème rang des déposants ; le nombre de dépôts de demandes de brevet auprès de l’office chinois (SIPO) a également explosé, avec 928.000 dépôts de brevets en 2014, dont 13,7% en provenance de l’étranger. Cependant, la situation est contrastée selon le domaine technique, les plus forts progrès ont été enregistrés dans le numérique, l’informatique et les télécommunications.

Parmi les 4 grands modèles d’innovation identifiés par Mc Kinsey, celui pour lequel la science est le moteur principal (« science based » innovation), dont font partie la création de médicament et la pharmacie au sens large, ne parait pas encore aussi compétitif que les autres pour le moment en Chine. Néanmoins, le dynamisme de ce secteur et les mesures du gouvernement devraient faire rapidement évoluer la tendance.  

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Du nouveau dans la propriété intellectuelle francophone

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Karlo Fonseca Tinoco, co-directeur de la Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle

Alors que notre blog se concentre sur la propriété intellectuelle en Chine, d’autres acteurs du monde juridique ont à cœur de faire rayonner la pensée francophone de la propriété industrielle en général. La Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle (RFPI) est née récemment à cette fin. Nous en sommes ravis, d’autant plus que ce sera l’occasion de commenter en particulier le droit chinois de la propriété intellectuelle. Voici une interview de l’un des directeurs de cette revue, Karlo Fonseca Tinoco, docteur en droit et avocat au Barreau de Sao Paulo, Brésil. 

– Pouvez-vous présenter quel est l’objet de la revue francophone de la Propriété Intellectuelle ? 

La Revue Francophone de la Propriété Intellectuelle (RFPI) a été conçue comme un instrument de diffusion de la culture juridique francophone en matière de droits de propriété intellectuelle. Elle s’insère dans un projet visant à permettre aux acteurs de la propriété intellectuelle d’avoir accès à l’actualité juridique des diverses régions du monde, en langue française. La RFPI est une revue bi-annuelle qui s’intéresse à l’actualité juridique. De ce fait, nous pouvons y trouver des articles de fond et de chroniques de jurisprudence touchant aux sujets d’actualité dans tous les continents du monde.


– Pourquoi avoir lancé une telle revue, quelle différence avec les revues existantes sur la propriété intellectuelle ? 

Le lancement de la RFPI par l’Association Francophone de la Propriété Intellectuelle est le fruit de la constatation de l’absence d’une revue en langue française permettant d’avoir une vision globale des enjeux contemporains en matière de droits de propriété intellectuelle dans toutes les régions de la planète. Nous pouvons affirmer que son ouverture vers le droit étranger différencie la RFPI des autres revues existantes sur la propriété intellectuelle, chaque numéro étant composé, de manière équilibré, d’articles concernant les droits nationaux ou régionaux dans chaque continent de la planète. Par ailleurs, la RFPI est une revue électronique intégralement en accès libre, ce qui la différencie également des autres revues existantes sur la propriété intellectuelle.


– Qu’est-ce que l’AFPI ? 

L’Association Francophone de la Propriété Intellectuelle résulte de l’initiative d’un groupe d’universitaires, chercheurs, industriels, conseils en propriété industrielle et avocats ayant pour objectif commun le rayonnement de la culture juridique francophone en matière de droits de propriété intellectuelle.

À vocation internationale, l’AFPI renforce la présence francophone dans les débats concernant les sujets d’actualité en propriété intellectuelle aux niveaux nationaux, régionaux et international. Dans ce cadre, l’AFPI réalise divers projets à d’envergure internationale, tels que l’organisation de conférences, la publication d’une revue et d’ouvrages avec le concours de partenaires universitaires et institutionnels étrangers.


– Est-ce que des articles seront prévus sur la propriété intellectuelle en Chine ? 

Le comité éditorial de la RFPI reçoit des propositions d’articles traitant des enjeux contemporains en matière de droits de propriété intellectuelle dans plusieurs pays d’Asie. La Chine, par son importance dans l’économie globale, a certainement une place d’honneur dans l’avenir de la RFPI. Nous espérons pouvoir partager avec nos lecteurs les discussions et les avis des spécialistes sur les derniers développements en droit chinois de la propriété intellectuelle.


– Avez-vous dores et déjà des projets en lien avec la Chine ? 

Comme nous l’avons précédemment évoqué, l’AFPI a pour objectif de renforcer la présence de la francophonie juridique dans les débats en matière de droits de propriété intellectuelle. Afin de réaliser cet objectif, l’AFPI organise de conférences permettant de rassembler universitaires, chercheurs, industriels, conseils en propriété industrielle et avocats pour débattre, dans une perspective comparée, des enjeux et solutions présents dans chaque pays. Dans ce cadre, en partenariat avec nos homologues chinois et avec le soutien des organisations françaises et européennes partenaires de l’AFPI, nous envisageons la réalisation prochainement d’un cycle de conférences en Chine.

Propos recueillis par Clémence VALLEE-THIOLLIER, du cabinet LLRllr_new

30 ans de coopération OEB et SIPO, la suite à Pékin

Après la grande conférence anniversaire qui a eu lieu à Lyon a lieu le 9 octobre, c’est au tour de la Chine de fêter les 30 ans de coopération entre l’Office d’Etat de la propriété intellectuelle de Chine (SIPO) et l’Office européen des brevets (OEB), avec une conférence qui avait lieu ce jeudi 26 novembre à Pékin.

A l’occasion de cette conférence, une délégation de l’OEB est venue d’Europe avec à sa tête le Président de l’OEB Benoît Battistelli.

Le thème de la journée était « Propriété intellectuelle, Innovation et Entrepreneuriat ». OEB SIPO 2Tout au long de la journée ont eu lieu des conférences sur la collaboration passée et future entre l’OEB et le SIPO. Les interventions ont notamment commémoré le chemin parcouru pendant ces 30 ans, en particulier concernant la formation des examinateurs chinois ou encore l’utilisation par le SIPO de l’outil EPOQUE développé par l’OEB et permettant aux examinateurs d’interroger un grand nombre de bases de données relatives aux brevets dans le monde. Ont été abordés par ailleurs les projets en cours de développement, tout particulièrement l’amélioration de la qualité des traductions automatiques proposées par les offices.

Une intervention de Song Jianhua, directrice générale du département des Lois et Traités du SIPO, a permis de présenter les modifications majeures qui seront apportées par la quatrième loi des brevets qui devrait entrer en vigueur prochainement en Chine, probablement en 2016 (des articles vont suivre sur ce sujet sur le blog). Cette nouvelle loi a pour but de mettre en oeuvre une meilleure protection des droits de propriété intellectuelle (mise en place en particulier de dommages et intérêts punitifs), ainsi qu’une amélioration de la qualité des brevets délivrés par le SIPO (par exemple, droits étendus pour les brevets de dessins) et du système juridique régulant la profession de mandataires en brevets.

Plusieurs responsables PI de compagnies internationales sont par ailleurs intervenus pour témOEB SIPO 1oigner de l’importance de la propriété intellectuelle dans la stratégie de développement de leur compagnie, notamment en Chine et en Europe. Relevons en particulier des interventions instructives de responsables de Philips, Huawei, Letv.

D’autres intervenants ont pu présenter des aspects de la collaboration entre la Chine et l’Europe en matière de brevets, notamment un représentant du groupe de travail sur les droits de PI de la Chambre de Commerce de l’Union Européenne, ou encore un représentant de l’Association des mandataires en brevets chinois (ACPAA, All-China Patent Attorneys Association).

Les organisateurs m’avaient en particulier proposé de faire une intervention sur les professions de mandataire en brevet en Europe et en Chine. Aussi, j’ai partagé mon expérience en présentant les principales différences entre les professions, les qualifications requises, les structures des cabinets, les pratiques des déposants européens / chinois et des offices OEB / SIPO, en concluant sur l’importance de créer des ponts entre les mandataires des deux continents, pour permettre une meilleure compréhension mutuelle dans les dossiers.

Nous ne pouvons que souhaiter à l’OEB et au SIPO, ainsi qu’à tous les autres acteurs du monde des brevets en Chine et en Europe, de poursuivre cette collaboration qui a été entamée il y a 30 ans et qui ne cesse de se renforcer.

Nouvelles mesures pour les droits d’auteur sur Internet

Dans le cadre de la « Sword Net Action » l’Autorité Chinoise de Protection du Droit d’Auteur vient d’édicter de nouvelles règles visant à protéger les contenus tels que les films, la musique ou les publications, en empêchant les utilisateurs des services de stockage sur le Cloud chinois de télécharger, stocker ou partager des fichiers susceptibles de contrevenir à un droit d’auteur.

Nous avions déjà annoncé en mai dernier que la Chine souhaitait renforcer sa protection des droits d’auteur, en voici une illustration. L’Autorité Chinoise de Protection du Droit d’Auteur vient d’annoncer ce 20 octobre de nouvelles règles visant à renforcer la protection des droits d’auteur en ligne, plus particulièrement concernant le stockage de données sur le Cloud.

Ces nouvelles mesures s’inscrivent dans la campagne « Sword net Action » mise en place par les Autorités chinoises afin de lutter de manière globale contre le piratage sur Internet.

En effet, si le stockage de données sur le Cloud est un service accessible partout dans le monde, celui-ci est tout particulièrement utilisé en Chine où les fournisseurs de services sur Internet proposent de stocker des volumes très importants à des prix dérisoires.

Evidemment, une telle liberté d’accès s’est accompagnée du stockage et de la mise à disposition au public d’un grand nombre de fichiers piratés constituant autant d’infractions aux droits des auteurs.

Dans ce contexte, les nouvelles règles édictées par l’Autorité de Protection du Droit d’Auteur  contraignent désormais  les sociétés de fourniture de services de stockage en ligne à prendre des mesures effectives visant à empêcher les utilisateurs des services de stockage chinois de télécharger, stocker ou partager des fichiers susceptibles de contrevenir à un droit d’auteur.

Cela se traduit par l’obligation de faire apparaitre sur leur page d’accueil un encart expliquant leur nouvelle politique en matière de contrefaçon des droits d’auteur afin que les utilisateurs soient informés des sanctions qu’ils encourent.

Elles devront également donner la possibilité aux titulaires de droits de déposer des plaintes, et s’engager à retirer dans les 24 h suivant la réclamation le contenu litigieux.

Les nouvelles règles prévoient encore notamment la possibilité pour les fournisseurs de services de stockage en ligne de mettre sur liste noire, de suspendre voire de fermer l’accès à leurs services pour les utilisateurs contrefacteurs.

Le renforcement de la lutte contre le piratage sur Internet est un enjeu important pour la protection des droits de propriété intellectuelle aujourd’hui, et la Chine démontre maintenant sa volonté de s’engager pleinement dans cette lutte.

Espérons que la mise en œuvre de ces nouvelles règles sera suffisamment stricte pour permettre leur efficacité.

OEB et SIPO : 30 ans de coopération

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Le premier accord de coopération entre les deux offices a été signé le 11 juin 1985.

Le 9 octobre dernier a eu lieu à Lyon une conférence marquant les trente ans de la coopération entre L’Office européen des brevets (OEB) et L’Office d’Etat de la propriété intellectuelle de Chine (SIPO). Nous proposons de revenir sur quelques-uns des projets ayant concrétisé cette collaboration.

La formation des examinateurs chinois

Le 11 juin 1985 est signé le premier accord de coopération entre les deux offices. Un intense programme de formation est alors mis en place. Comme le rappelle Benoit Battistelli, président de l’OEB, dans une interview au journal Les Echos, en trente ans, 1000 examinateurs de brevets chargés d’instruire les demandes chinoises ont été formés par l’OEB, ainsi que 3000 experts de la propriété intellectuelle : juges, avocats, conseils. Les examinateurs chinois se sont rendus à l’OEB pour y suivre des stages de longue durée, tandis que le personnel de l’OEB a dispensé des cours à Pékin.

Un premier outil partagé : EPOQUE…

La formation n’est pas la seule forme de collaboration des deux offices. En 1995, l’office chinois se dote de la technologie EPOQUE, développée par l’OEB. EPOQUE est un système permettant d’interroger aujourd’hui plus de 120 bases de données présentant des brevets ou des demandes de brevet sous format numérique. Ainsi, l’adoption par l’office chinois de cette technologie lui a permis d’économiser les coûts de conception d’un tel système, et d’avoir accès à une technologie déjà utilisée avec succès. Du côté européen, les examinateurs de l’OEB ont pu alors avoir accès aux demandes de brevet chinoises et aux brevets chinois sous format numérique. De plus, comme l’indique l’OEB dans son document d’information concernant la conférence, « Pour les entreprises et investisseurs européens, l’adoption d’EPOQUE [par l’Office chinois, ndlr] signifiait que les procédures de recherche et d’examen des brevets en Chine reposeraient sur une documentation et des méthodes similaires à l’OEB. Cela garantissait également que les données sur les brevets européens seraient pleinement prises en compte, et, par voie de conséquence, que les brevets seraient de qualité fiable en Chine. »

…Qui en amena d’autres

Si EPOQUE est l’une des premières collaborations techniques marquantes entre les deux offices, ce n’est pas la dernière. En effet, en 2012, l’outil de traduction utilisé par l’OEB, « Patent Translate » est étendu à la Chine, ce qui permet une traduction « chinois-anglais » (du chinois vers l’anglais) gratuite et accessible au public. Aujourd’hui, plus de 7,2 millions de documents chinois sont désormais traduisibles automatiquement en anglais grâce à cet outil. 40 000 demandes de traduction « chinois-anglais » sont faites par jour, 17 000 dans le sens « anglais-chinois ».

Le « Global Dossier » : une vue globale sur les familles de brevets

Poursuivant son rapprochement avec les autres offices mondiaux, la Chine adopte en 2013 la Classification coopérative des brevets (dite « CPC »), système de classification des documents relatifs aux brevets élaboré conjointement par l’OEB et l’office des brevets et des marques américains (USPTO). En effet, il semble que le futur soit à un rapprochement plus important entre les différents offices mondiaux, notamment sur initiative conjointe de l’OEB et du SIPO. Ainsi, l’OEB et le SIPO lancent en juin 2014 le « Global Dossier », définit comme « un outil offrant un point d’accès unique aux informations sur la poursuite parallèle des demandes dans différents offices ». D’abord partagé uniquement par les européens et les chinois, le Global Dossier est adopté par le Japon et la Corée du Sud en avril 2015 puis par les Etats-Unis en juin. En effet, ces cinq pays traitent 80% des demandes de brevets mondiales. Or, sur 2,2 millions de demandes reçues par ces offices, 300 000 font l’objet de dépôts croisés dans deux offices ou plus. Il est donc très pertinent d’avoir accès au parcours des différents brevets d’une même famille. Le partage d’informations entre les plus grands offices rend cela possible.

Une collaboration à poursuivre

A l’occasion de cet anniversaire de trente ans, la collaboration entre le SIPO et l’OEB est donc mise à l’honneur. Il reste toutefois des progrès à effectuer. Ainsi, quiconque a utilisé l’outil « Patent Translate », mis en avant à l’occasion de cet anniversaire, sait que son résultat est parfois décevant, et qu’il alors nécessaire de faire réaliser une vraie traduction. Pourtant, l’intérêt d’un tel outil est évident. Au vu des progrès technologiques en cours, nul doute cependant que la qualité des traductions automatiques va constamment s’améliorer dans les années à venir. On peut également s’interroger sur le fonctionnement des juridictions chinoises. Aujourd’hui il existe différentes juridictions localisées dans certaines provinces, ce qui entraîne des disparités dans les jugements rendus, et on peut se demander si la Chine, qui jusque-là s’est inspirée de l’OEB dans son fonctionnement, va suivre jusqu’au bout cette démarche et mettre en place une juridiction unifiée sur le modèle de celle qui devrait être installée dans les prochains mois en Europe. En tout cas, la collaboration entre l’OEB et le SIPO va se poursuivre dans les années qui viennent, le commissaire du SIPO, Shen Changyu, déclarant à l’occasion de la conférence que l’office chinois est prêt à travailler avec l’OEB afin d’approfondir leur partenariat stratégique, de manière à contribuer de façon plus importante au développement économique, scientifique et culturel, non seulement en Europe et en Chine, mais également dans le monde.

Traitement de l’ hépatite C : la Chine prend position

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L’ hépatite C touche près de 3,2% de la population chinoise.

En juin 2015, l’Office chinois des brevets (SIPO) a rejeté la demande de brevet au nom de Gilead, portant sur le Sofosbuvir un puissant inhibiteur d’une enzyme du virus de l’hépatite C.
L’Office a conclu que le Sofosbuvir correspond à une variante évidente d’un composé connu depuis 2005.

Le Sofosbuvir est un composé chimique inactif qui acquiert ses propriétés thérapeutiques in vivo lorsqu’il est partiellement dégradé par les cellules cibles. D’après le SIPO, une telle molécule peut être obtenue de manière évidente pour l’homme du métier.

Il faut rappeler que le Sofosbuvir (commercialisé sous la marque SovaldiTM) est, en association avec la ribavirine, le traitement le plus efficace pour le traitement de l’hépatite C chronique. En effet, sa spécificité pour la polymérase du virus (enzyme qui permet la multiplication de l’information génétique du virus) et son efficacité (près de 90% des patients atteints d’hépatite C) semblent avoir révolutionné le traitement d’une infection touchant près de 200 millions d’individus, dont près de 3,2% de la population chinoise.

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Le Sofosbuvir est un puissant inhibiteur d’une enzyme du virus de l’ hépatite C.

Mais ce succès thérapeutique a un prix colossal : aux Etats-Unis, le prix du traitement est de l’ordre de 85 000 dollars pour 12 semaines de traitement. La raison vient probablement du rachat de la société Pharmasset (à l’origine de la conception de la molécule) pour une valeur de plus de 10 milliards de dollars.
La France et l’Allemagne ont abaissé le prix de commercialisation du traitement de 12 semaines à environ 40 000 euros après d’intenses négociations avec Gilead. Mais ce prix reste encore trop élevé pour les pays en voie de développement particulièrement touchés par le virus.

Un système de licence volontaire a été négocié avec 60 états où la prévalence du virus est importante pour la fabrication et la distribution à prix « plus accessible » (de 22 à 46% du prix américain). Cette licence couvre notamment l’Egypte et l’Inde, mais exclut la Chine.

Alors pourquoi ne pas recourir à une licence obligatoire prévue à l’article 31 de l’accord sur les droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (accords ADPIC) ?
Les accords ADPIC autorisent en effet les « utilisations de l’objet d’un brevet sans l’autorisation du détenteur du droit, y compris l’utilisation par les pouvoirs publics ou des tiers autorisés par ceux-ci », en particulier pour des raisons de santé publique.
En 2008, la Chine a renforcé son dispositif légal concernant les licences obligatoires en matière de santé publique (“Measures for Compulsory Licensing of Patent Implementation Regarding Public Health” (Order No. 37)), qui ont encore été clarifiées en 2012 pour y inclure la notion de licence obligatoire pour « situation extraordinaire ou d’urgence » ou « intérêt public ».

Mais dans le cas du Sofosbuvir, la licence obligatoire aurait-elle été pertinente ?

Le rejet par le SIPO de la demande Gilead va éviter de répondre à cette épineuse question, car ce rejet va probablement permettre aux génériqueurs de proposer un équivalent à un prix bien plus attractif.

On notera que l’Egypte et l’Inde ont, malgré la licence volontaire, opté pour une invalidation des brevets, et qu’une opposition à l’encontre de brevet européen a été formée au motif que l’invention est dépourvue d’activité inventive, comme en Chine.

Mais Gilead dispose d’autres demandes de brevet en instance…

La saga du traitement de l’hépatite C est donc loin d’être terminée.