Voici la deuxième partie de notre session de questions-réponses sur le thème de l’enregistrement de marques en Chine. La première partie est disponible ici. Dans cette deuxième partie, nous allons particulièrement étudier la procédure d’enregistrement et ses effets, la particularité de la marque notoire et l’enregistrement international.
Une fois la demande d’enregistrement déposée, que se passe-t-il ?
Une fois la demande d’enregistrement déposée, celle-ci sera examinée par un examinateur du CTMO (office des marques chinois). Celui-ci vérifie, outre le respect de la procédure, que les conditions de validité de la marque sont remplies. Une fois l’examen réalisé et si le CTMO estime que la marque en question respecte les conditions de validité listées dans la première partie de cet article, il accorde alors une approbation préliminaire de la marque et procède à sa publication dans la gazette.
A défaut d’opposition de tiers pendant une période de 3 mois à compter de la publication, la marque est définitivement enregistrée. Par ailleurs, du fait de la ratification par la Chine de la Convention de Paris, le dépôt prioritaire est applicable, ce qui permet aux entreprises européennes, si elles déposent une demande d’enregistrement en Chine dans les 6 mois suivant l’enregistrement de leur marque en Europe, de conserver la date de la demande originale comme date de dépôt de la marque en Chine.
La marque notoire en Chine – comment est-elle protégée ?
En principe, l’enregistrement d’une marque est obligatoire pour bénéficier de la protection du droit des marques. Il existe cependant dans la loi chinoise des marques une exception à cette exigence, qui permet la défense des marques notoires même en l’absence d’enregistrement.
La marque notoire est une marque qui a acquis une forte réputation auprès du public chinois, grâce à une utilisation intensive et continue, et qui est reconnue comme telle par ce public. La qualification de marque notoire s’opère au cas par cas et permet à une marque non enregistrée de bénéficier d’une protection parfois plus large que celle d’une marque enregistrée, puisqu’elle peut permettre dans le meilleur des cas au titulaire de la marque d’une part, de s’opposer à l’enregistrement d’une marque identique ou similaire et d’autre part, de faire annuler un enregistrement de marque d’une marque identique ou similaire – et ce même si la marque enregistrée couvre des produits et services différents de ceux pour lesquels la marque notoire est utilisée.
Il faut cependant bien comprendre qu’il est difficile d’obtenir la qualification de marque notoire. En effet, les facteurs pris en compte par le CTMO pour procéder à la qualification de marque notoire sont précisés dans la loi et incluent notamment la durée et la zone géographique de l’utilisation de la marque, les volumes de vente, le degré de similarité avec la marque litigieuse, la probabilité de confusion entre les deux marques etc.
L’article 32 de la loi des marques constitue une alternative fréquemment invoquée car elle interdit le dépôt de mauvaise foi de marques non enregistrées mais bénéficiant d’une « certaine réputation » en Chine. De plus, le CTMO rejette régulièrement des dépôts frauduleux de marques en se fondant sur l’article 10 qui prévoit l’interdiction des marques trompeuses susceptibles d’induire le public en erreur quant à la qualité ou aux autres caractéristiques du produit.
Relevons que ces dernières années, les cours chinoises s’efforcent de lutter contre la pratique de dépôt frauduleux de marque, ou « trademark squatting », en offrant notamment une meilleure protection aux marques notoires non enregistrées. Pour cela, elles se fondent sur ces différentes dispositions de la loi des marques et n’hésitent pas à faire évoluer les critères pris en considération pour la qualification de marque notoire, comme nous avons pu le voir récemment dans l’article « Nouvelle avancée dans la protection des marques non enregistrées en Chine ».
Quelle est la durée de vie d’une marque après son enregistrement ?
La protection conférée par le régime des marques est de 10 ans à compter de la date d’enregistrement. A l’issue de ces 10 ans, le renouvellement est possible tous les 10 ans, de façon illimitée, sous réserve que la demande en soit faite six mois auparavant.
Il convient de noter cependant que le titulaire d’une marque qui ne l’utilise pas pendant plus de 3 années consécutives s’expose à une demande de déchéance de marque qui peut être soumise au CTMO par un tiers.
Faut-il inscrire une licence de marque auprès de l’Office chinois des marques ?
Si vous souhaitez signer un accord de licence relatif à votre marque, il convient de faire inscrire cette licence auprès de l’Office chinois des marques (CTMO). Bien qu’un contrat de licence non inscrit reste toujours valable entre les deux parties, l’absence d’inscription peut être un obstacle pour le paiement des redevances dans certains cas. De plus, le licencié non inscrit ne peut pas s’opposer à l’exploitation de la marque par un tiers de bonne foi. Pour plus d’informations sur ce sujet, nous vous proposons de relire l’article « La licence de marque en droit chinois ».
Est-il possible de protéger une marque en Chine par le biais d’un enregistrement international ?
Le dépôt d’une marque peut se faire soit directement en Chine soit par le biais d’un enregistrement international en vertu du Protocole de Madrid. Cet enregistrement international peut s’avérer particulièrement attractif pour certains déposants. Ainsi, si vous souhaitez obtenir une protection dans de nombreux pays, les coûts d’un dépôt international sont généralement plus bas que ceux à prévoir pour les dépôts nationaux. De plus, le dépôt international offre une gestion centralisée du portefeuille de marque.
L’enregistrement international présente cependant certains inconvénients qu’il convient aussi de relever, le principal étant que, dans la procédure internationale, la demande de marque ne précisera pas les sous-classes chinoises souhaitées par le déposant. Ainsi, lorsque la demande sera réceptionnée par un examinateur du CTMO, c’est lui qui va choisir les sous-classes qui lui semblent les plus adéquates pour votre activité. Le déposant n’est donc pas consulté sur ce choix et s’expose aux éventuelles approximations de l’examinateur. Or, comme nous l’avions vu dans la première partie de cet article, le choix des sous-classes est à considérer avec attention. Relevons que, certes, un déposant national n’est pas consulté non plus, mais dans cette situation, comme nous l’avons indiqué dans l’article « Libellé d’une marque nationale en Chine, quelques conseils ? », il reste possible d’adapter le libellé de la marque au regard des sous-classes souhaitées.
Les deux méthodes ayant leurs avantages et leurs inconvénients, le choix dépendra de la situation du déposant. Il est recommandé de faire appel à un conseil en propriété intellectuelle qui vous proposera une stratégie de dépôt adaptée à vos besoins.
Si vous faites le choix de l’enregistrement international, il est recommandé de demander au CTMO de délivrer un certificat d’enregistrement de marque internationale valide en Chine (voir notre article sur le sujet « Pour utiliser votre marque en Chine, pensez au certificat d’enregistrement ! »). Ce certificat constituera une preuve obligatoire de votre droit pour des mesures d’application.
Une fois le titre obtenu par la voie nationale ou internationale, celui-ci va permettre au titulaire de la marque de s’opposer aux actes de contrefaçon commis sur le territoire chinois. Il existe de nombreux recours en la matière, régulièrement abordés sur ce blog.
Article rédigé par Audrey DRUMMOND