Revendiquer son droit d’auteur dans un litige de marque
Image by Nazar Hrabovyi on Unsplash

Revendiquer son droit d’auteur dans un litige de marque

Une option méconnue mais efficace

Dans de nombreuses affaires de litiges de marques, qu’il s’agisse de procédures d’opposition ou d’invalidation de marque, il est parfois difficile de revendiquer un droit de marque. C’est notamment le cas lorsque la marque du titulaire du droit n’a pas été enregistrée en Chine, ou que, malgré son enregistrement, la marque désigne des classes différentes de celles désignées par la marque objet du litige.

Dans de telles circonstances, revendiquer un droit d’auteur peut être une option efficace, lorsque la marque du titulaire du droit est également protégée par le droit d’auteur. Par exemple, une marque figurative ou semi-figurative peut être composée en tout ou partie d’une œuvre protégée par le droit d’auteur, ce qui permet à son titulaire de le revendiquer dans le cadre d’un litige de marque. Dans cet article, nous souhaitons présenter à nos lecteurs un aperçu de la protection du droit d’auteur en Chine et ses avantages lorsqu’on le revendique dans un litige de marque.

1. Les avantages du droit d’auteur comparé au droit de marque

Un champ de protection plus large

Comme vous le savez, le droit de marque est obtenu à l’issue d’une procédure d’enregistrement relativement longue, pendant laquelle un examen de fond va être conduit. De plus, la portée de la protection du droit de marque est limitée aux catégories de biens et de services désignées lors du dépôt. Contrairement au droit de marque, le droit d’auteur est automatiquement accordé aux créateurs et aux auteurs et la portée de la protection du droit d’auteur n’est limitée à aucun domaine spécifique.

Absence de risque de déchéance

La marque est également vulnérable à une action en déchéance si elle n’est pas utilisée pendant trois années consécutives, alors que le droit d’auteur est un droit automatique et ne peut être annulé par un tiers.

Effet moindre du principe de territorialité

Bien que le droit de marque et le droit d’auteur soient tous deux territoriaux, la portée territoriale du droit d’auteur est beaucoup plus large que celle du droit de marque. En effet, une marque n’est protégée que dans les pays dans lesquels elle a été enregistrée. Ainsi, une marque enregistrée en France n’a pas d’effet en Chine et vice versa. Concernant le droit d’auteur, la Chine étant membre de la Convention de Berne, les droits d’auteur protégés dans l’un des États membres de la Convention de Berne (incluant la France) sont également protégés en Chine.

Charge de la preuve réduite

Lorsqu’il est nécessaire de démontrer son droit, la preuve de titularité est légèrement plus facile à apporter pour un droit d’auteur que pour un droit de marque. En effet, pour prouver la titularité d’une marque en Chine, seules les preuves provenant de Chine continentale seront prises en compte. Au contraire, les preuves recueillies en dehors de la Chine seront également prises en compte pour la protection du droit d’auteur.

2. La revendication d’un droit d’auteur à l’encontre d’un droit de marque

La revendication d’un droit d’auteur à l’encontre d’un droit de marque peut être très efficace lorsque les conditions suivantes sont rassemblées :

  • le titulaire du droit d’auteur a bénéficié de ce droit antérieurement à la date de dépôt de la marque contestée ;
  • la marque est identique ou substantiellement similaire à l’œuvre dont le droit d’auteur antérieur est détenu par le titulaire ;
  • le déposant de la marque a accédé ou a eu la possibilité d’accéder à l’œuvre en question ;
  • le déposant de la marque contestée n’a pas obtenu l’autorisation du titulaire du droit d’auteur.

3. Pour prouver un droit d’auteur antérieur, des preuves suffisantes doivent être fournies

 Dans la pratique, il n’existe pas de réglementation claire indiquant quel volume de preuves sera considéré comme suffisant.

Les preuves utiles comprennent, de façon non exhaustive, les éléments suivants :

  • un certificat de droit d’auteur délivré par le Centre de protection du droit d’auteur en Chine ou par un État membre de la Convention de Berne, ou un certificat obtenu via une méthode d’horodatage ;
  • des documents de création démontrant la titularité (par exemple, manuscrits ou contrats) ;
  • des éléments de preuve démontrant l’utilisation publique antérieure de l’œuvre en Chine ou à l’étranger.

À noter que, si le demandeur ne fournit qu’un certificat d’enregistrement du droit d’auteur, celui-ci ne suffit pas à prouver la jouissance antérieure du droit d’auteur. Le certificat d’enregistrement du droit d’auteur ne peut être utilisé que comme preuve prima facie et doit être étayé par une preuve de création ou de publication pour prouver la propriété.

Etude de cas : OLIV’COSMO

OLIV’COSMO est une société spécialisée dans la fabrication et la vente de cosmétiques à base d’huile d’olives. Elle a déposé sur le territoire français sa marque semi-figurative composée de l’élément verbal BIOCOSME et d’un élément figuratif prenant la forme d’une branche d’olivier.

Attirée par les opportunités offertes par le marché chinois, et suite à sa participation à un premier salon du cosmétique à Shanghai, elle souhaite débuter la commercialisation de ses produits en Chine.

Sensibilisée à l’importance du dépôt de marque en Chine, les dirigeants de OLIV’COSMO lancent les démarches. Cependant, les recherches d’antériorités effectuées préalablement au dépôt révèlent que leur marque semi-figurative a déjà été déposée par un tiers peu de temps après la participation d’OLIV’COSMO au salon de Shanghai. OLIV’COSMO a ainsi été victime, comme de nombreuses entreprises étrangères et chinoises, de squattage de marque.

Ne détenant pas de droit de marque en Chine, le cabinet de propriété intellectuelle qui accompagne OLIV’COSMO lui conseille de s’opposer à l’enregistrement de la marque en revendiquant son droit d’auteur sur la partie figurative de la marque.

Dans le cadre de la procédure d’opposition, OLIV’COSMO fournit le contrat de conception graphique signé avec le créateur du logo, qui contient en annexe un spécimen du logo. La société fournit également des preuves de sa participation au salon de Shanghai afin de tenter de convaincre l’office des marques du fait que le squatteur de marque a eu accès à l’œuvre. Un tel dossier d’opposition devrait permettre à OLIV’COSMO d’obtenir gain de cause et d’enregistrer à son tour la marque.

À retenir  

Lorsqu’une marque est identique ou substantiellement similaire à une œuvre dont le droit d’auteur est détenu par une autre partie, et dans l’hypothèse où le plaignant ne dispose d’aucun droit de marque en Chine, le droit d’auteur est une base juridique très utile pour lutter contre la marque contestée. Il peut permettre au titulaire du droit de bénéficier d’une protection solide qui ne se limite ni à un territoire ni à un domaine spécifique, et qui pourrait lui permettre d’attaquer une marque déposée de mauvaise foi, mais également de défendre sa marque en Chine.

 

Article rédigé par Fujuan DAI