Le 1er avril 2021, la Haute Cour de la province de Canton, juridiction de 2e instance, a annoncé qu’elle soutenait la revendication de Lego dans une affaire de contrefaçon et de concurrence déloyale concernant la marque Lepin.
Derrière la marque Lepin, plusieurs fabricants de produits Lego contrefaits et de qualité médiocre, qui sévissent depuis de nombreuses années, et ont poussé le groupe Lego à agir, engageant de nombreuses actions en justice, dont certaines commentées sur notre blog (notamment Affaire Lego : condamnation pénale de 9 contrefacteurs sur le terrain du droit d’auteur ou Litige en propriété intellectuelle : Lego construit sa stratégie en s’appuyant sur le droit d’auteur et les marques notoires).
Une indemnisation revue à la hausse
L’indemnisation prononcée est de 30 millions RMB, soit 10 fois le montant qui avait été accordé en 1re instance par la Cour de PI de Canton.
Revenons tout d’abord sur les faits de cette affaire. Trois sociétés chinoises (Guangdong Meizhi Zhijiao Technology Co., Ltd., une de ses filiales et Shantou Zhilepin Toys Co., Ltd, ci-après les « défendeurs ») ont fabriqué et commercialisé depuis 2015 une grande quantité de copies de jeux « Lego » portant la marque « Lepin ».
La Cour de PI de Canton, saisie de cette affaire, a jugé que les défendeurs avaient utilisé, sans l’autorisation de Lego, plusieurs marques appartenant à Lego, ce qui constituait une contrefaçon de marques. Elle a également relevé que le nom utilisé par les défendeurs était similaire au nom d’un produit de Lego ayant une certaine influence, ce qui constituait un acte de concurrence déloyale. La Cour s’est fondée sur ces motifs pour fixer le montant des dommages et intérêts à payer à Lego à 3 millions de CNY (environ 390 875 euros).
Aucune des parties n’étant satisfaite par ce montant d’indemnisation, elles ont toutes fait appel de la décision.
La Haute Cour de Canton, juridiction de 2e instance, a confirmé la qualification de contrefaçon de marques et d’acte de concurrence déloyale. Concernant le montant de dommages et intérêts, elle l’a revu à la hausse, en prononçant une indemnisation de 30 millions RMB (environ 3 908 754 euros) pour compenser les pertes économiques ainsi que les dépenses raisonnables payées par Lego pour arrêter ces infractions.
Motifs de la décision
La Haute Cour de Canton a donc suivi la demande d’indemnisation de Lego en s’appuyant sur plusieurs motifs.
La Cour a tout d’abord estimé que la société Meizhi avait copié les jouets Lego pendant quatre ans, violant huit marques et un nom commercial ayant une certaine influence au sens de l’article 6 paragraphe 2 de la loi contre la concurrence déloyale.
Elle a également pris en compte le fait que les marques de Lego étaient utilisées et faisaient l’objet de promotion de la part de Lego depuis longtemps, par conséquent ces marques avaient acquis une très grande réputation sur le marché du jouet. Les marques déposées de Lepin étaient par ailleurs très similaires à celle de Lego en termes de combinaison de couleurs, de forme et d’apparence visuelle générale, ce qui pouvait créer une confusion pour les consommateurs.
Enfin, la Cour a relevé que, selon la décision de la Haute Cour de Shanghai mentionnée ici, et seulement sur la période allant du 11 septembre 2017 au 23 avril 2019, les revenus des activités commerciales de Meizhi dans la production et la vente des produits contrefaits avaient atteint 330 millions de CNY. En outre, selon les données sur les ventes de produits Lepin fournies par la plateforme Taobao, la Cour a décidé qu’on pouvait raisonnablement présumer que le montant de ventes de produits contrefaits avait dépassé 500 millions de CNY et, en se référant au taux de profit de l’industrie en question, le profit global des produits contrefaits devait être bien supérieur à 160 millions de CNY.
La Haute Cour de Canton a donc estimé que l’infraction commise par la société Meizhi avait duré longtemps, qu’elle était de grande ampleur, rentable, organisée et manifestement malveillante. Par conséquent, cela constituait une infraction grave et devait donner lieu à de lourdes sanctions. Par conséquent, la cour a pleinement soutenu la réclamation du groupe Lego et lui a accordé des dommages et intérêts à hauteur de 30 millions de CNY.
Une décision saluée par Lego
Dans son communiqué de presse, la direction de Lego a salué cette décision et « l’engagement des autorités chinoises à créer une environnement commercial favorable pour les entreprises multinationales ». En effet, comme nous le relayons régulièrement sur ce blog, le gouvernement chinois a pris, ces dernières années, des mesures sévères contre les violations de droits de PI et les actes de concurrence déloyale. En particulier, les dommages et intérêts prononcés pour indemniser les victimes de ces infractions ont considérablement augmenté.
Ces évolutions positives ne doivent pas nous faire oublier qu’il est impératif pour les sociétés étrangères de mettre en place une stratégie de protection intellectuelle adaptée au marché chinois et à sa règlementation. Ainsi, dans les différentes affaires dans lesquelles l’entreprise était impliquée, Lego a pu s’appuyer à la fois sur ses marques (dont des marques notoires non enregistrées), son droit d’auteur ainsi que sur la législation relative à la concurrence déloyale.
Article rédigé par DONG Li de LLR China.