Nous relayons ici une décision qui devrait rassurer les acteurs de la gastronomie française sur la préservation de leurs marchés en Chine.
A l’heure où les passerelles commerciales ne cessent de s’intensifier entre la France et la Chine, et où le PDG de JD.com (la célèbre plateforme chinoise de e-commerce, concurrente de Taobao et Amazon en Chine) s’est engagé, le 10 janvier 2018 dernier, à vendre pour 2 milliards d’euros de produits français aux consommateurs chinois au cours des 2 prochaines années, les questions de l’accès des acteurs de la gastronomie française au marché chinois, et de la chasse aux contrefaçons de produits alimentaires français, sont plus que jamais d’actualité.
En décembre 2017, l’Office chinois des marques (CTMO) a clos le suspense d’une affaire intéressant la France et la Chine, en refusant la demande d’enregistrement de la marque CALISSONS D’AIX. L’affaire a fait grand bruit dans la presse hexagonale et débute en 2015, quand est déposée en Chine une demande d’enregistrement de la marque « CALISSONS D’AIX » et sa translittération en caractères chinois « 卡丽松» (« Kalisong »), auprès du CTMO par un ressortissant chinois. Le dépôt est fait en classe 30, qui inclut notamment les biscuits, gâteaux, sucreries et confiseries.
En 2016, le CTMO rend une décision d’approbation de la demande de marque chinoise et publie un enregistrement préliminaire, lequel suscite la colère des producteurs de calissons français. Nous en avions à ce stade fait état sur ce blog à travers l’article : Bientôt des calissons d’Aix « made in China » ?
Les 12 fabricants de calissons, regroupés en UFCA (Union des Fabricants de Calissons d’Aix), ont déposé dans le délai de 3 mois requis une opposition contre la demande de marque CALISSONS D’AIX devant le CTMO qui a été couronnée de succès.
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Des enjeux importants pour les producteurs français artisanaux désireux d’exporter en Chine
Le véritable Calisson d’Aix est issu d’un savoir-faire ancestral, inventé à Aix. Aussi pour les producteurs français, il ne peut donc y avoir de véritable Calisson d’Aix que « made in France ». Or, l’enregistrement de cette marque en Chine aurait donné à son titulaire l’exclusivité de la commercialisation de calissons en Chine. Résultat, les calissons français authentiques se seraient vus bloquer l’accès à l’important marché chinois, alors que la Chine s’intéresse de plus en plus à la gastronomie française, reconnue comme gage de qualité.
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Une décision du CTMO fondée sur plusieurs motifs
Nous l’avons évoqué à plusieurs reprises sur le blog, il n’est pas rare que des sociétés étrangères découvrent au moment de commercialiser leurs produits en Chine que leur marque y a déjà été enregistrée par une société locale (vous pouvez notamment vous référer au cas intéressant de New Balance : Enregistrement de marque en caractères chinois, le cas New Balance). Une mauvaise surprise à n’en pas douter et une gêne tant économique que commerciale non négligeable.
En l’espèce, le CTMO a d’une part reconnu le terme « Calissons » comme une appellation patrimoniale de gastronomie française. Il a également considéré que la marque déposée en Chine n’était pas distinctive par rapport au produit désigné car « Calissons » est un terme générique de produit. Enfin, le CTMO a relevé que la demande chinoise pouvait induire en erreur les consommateurs sur l’origine géographique des produits parce qu’Aix est un nom géographique connu en Chine.
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Comment protéger une indication géographique étrangère en Chine?
Depuis 1991, la marque « Calissons d’Aix » a été déposée en France auprès de l’INPI et bénéficie du régime des « marques collectives », qui autorise toute personne respectant un règlement d’usage à exploiter la marque et instaure un système de contrôle sur le produit. Mais cette protection a une portée purement nationale et ne suffit pas à éviter les contrefaçons au niveau international.
L’UFCA a également débuté en 2000 une procédure de demande d’IGP (délivrée par la Commission Européenne) des Calissons d’Aix, mais celle-ci n’a eu de cesse d’être retardée, si bien que la procédure n’a pas encore abouti.
A noter qu’en Chine, plusieurs produits européens, dont des produits français, sont désormais protégés en tant qu’Indication Géographique (ci-après IG), selon une procédure propre à la Chine. L’on citera le roquefort, le comté, le pruneau d’Agen ou encore le jambon de Parme, qui sont désormais protégés des contrefaçons quand ils sont commercialisés en Chine. Depuis 2016, 45 vins français bénéficient également de l’indication géographique « Bordeaux », comme nous l’avions déjà indiqué.45 appellations de vins de Bordeaux reconnues en Chine.
La Chine a reconnu également l’indication géographique « Champagne ». Pour plus d’informations sur les IG en Chine, voir notre article La protection des indications géographiques en Chine.
Dans le cadre de cette affaire, le CTMO a fait savoir qu’il n’était pas possible pour quiconque de déposer « Calissons d’Aix » comme une marque de produit car ce signe n’est pas distinctif et est trompeur quant à l’origine du produit. Comment l’UFCA pourra-t-elle obtenir une protection en Chine ? La seule solution serait de déposer une marque collective ou une marque de certification ayant pour objet une indication géographique, ce qui se fera en deux étapes. Tout d’abord, l’UFCA doit attendre la reconnaissance de l’indication géographique (ici une IGP, mais cela aurait également pu être une AOC ou une IGPIA française), puis déposer « Calissons d’Aix » en Chine sous forme de marque collective ou de marque de certification. Elle permettrait enfin aux confiseurs historiques d’être certains que leur savoir-faire traditionnel est reconnu et d’avoir la garantie que le consommateur chinois achète un produit authentique et non une contrefaçon.
Rédigé par Clémence PAILLET AUGEY et Audrey DRUMMOND du cabinet LLR China
Article rédigé par Audrey DRUMMOND