Pas d’indulgence pour les contrefacteurs
Comme nous le relatons régulièrement sur notre blog, le secteur du vin fait partie des secteurs particulièrement touchés par la contrefaçon en Chine. L’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) « Bordeaux » ne fait pas exception. En Chine, cette AOC est protégée par une marque collective dont le titulaire est le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB).
Avec l’aide des autorités chinoises, le CIVB lutte activement et depuis de nombreuses années contre la contrefaçon des vins de Bordeaux, notamment dans le Shandong, province côtière connue pour ses vignobles mais dans laquelle les contrefacteurs sont légion. Nous en parlions déjà dans un précédent article. Plusieurs procédures pénales sont actuellement en cours. L’une d’elles s’est récemment soldée par la condamnation sévère d’un contrefacteur par un tribunal de Shanghai, en janvier 2023. Dans sa décision, le tribunal a décidé de maintenir les sanctions prononcées par le tribunal de première instance, et notamment la peine de prison, malgré certaines circonstances atténuantes dont le contrefacteur souhaitait se prévaloir.
Un signal fort envoyé aux contrefacteurs de vins chinois ? Non, le fait pour le contrefacteur d’avouer volontairement les faits et de dédommager activement la victime ne lui permet pas de bénéficier d’une peine plus légère. De même, le tribunal a refusé de prendre en compte le fait que le vin en question respectait les normes nationales, et ne portait donc pas atteinte à la santé des consommateurs chinois.
L’affaire débute en décembre 2015, lorsque Monsieur Wang crée une entreprise viticole à Yantai dans la province du Shandong. De 2019 à 2021, l’entreprise produit et distribue plus de 60 000 bouteilles de vin contrefait de Bordeaux, pour une valeur de plus de 880 000 CNY (plus de 115 000 euros). En 2021, la police fait une descente dans les locaux de l’entreprise et procède à une saisie de 16 000 bouteilles de vin estimés à 260 000 CNY (environ 34 000 euros). Monsieur Wang avoue les faits et accepte de dédommager le CIVB à hauteur de 1,28 million CNY (168 500 euros).
Le tribunal de première instance, saisi de l’affaire, condamne l’entreprise à une amende de 450 000 de CNY (environ 59 000 euros) pour contrefaçon de marque enregistrée, et Monsieur Wang à trois ans d’emprisonnement et à une amende de 100 000 CNY (environ 13 000 euros).
Monsieur Wang fait appel de cette décision auprès du tribunal intermédiaire de Shanghai. Dans le cadre de sa défense, il explique que les profits illégaux ont été récupérés par le titulaire de la marque, et que les produits contrefaits et les outils de fabrication ont été confisqués. Il déclare également que le vin en question était conforme aux normes nationales et ne portait donc pas atteinte à la santé des consommateurs. Il demande donc à être condamné à une peine plus légère.
Dans sa décision, le tribunal intermédiaire de Shanghai confirme la qualification de contrefaçon de marque enregistrée.
Pour prononcer sa décision, le tribunal prend notamment en considération le fait que Monsieur Wang et son entreprise ont produit en connaissance de cause les bouteilles de vin portant la marque déposée « BORDEAUX » sans l’autorisation du titulaire de la marque, et qu’ils ont falsifié des documents d’importation afin de faire croire aux consommateurs que leurs produits venaient bien de Bordeaux. Le tribunal estime donc que ces comportements étaient particulièrement graves et portaient non seulement atteinte aux droits et intérêts légitimes du titulaire de la marque enregistrée, mais perturbaient également l’ordre économique du marché et causaient un préjudice social important.
Il énonce que, bien que Monsieur Wang ait volontairement avoué les faits et activement dédommagé le titulaire, la peine prononcée par le tribunal de première instance n’était pas inappropriée. Le tribunal intermédiaire de Shanghai décide donc de confirmer le jugement de première instance, démontrant ainsi le sérieux dont les tribunaux font désormais preuve face aux contrefacteurs de vin du Shandong.
Article rédigé par DONG Li du cabinet LLR China