La Haute Cour de Shanghai (Shanghai High People’s Court) a récemment confirmé la condamnation de 9 personnes pour contrefaçon des droits d’auteur de Lego sur ses célèbres briques. Cette affaire, qui implique des montants très importants, se veut exemplaire face à la multiplication des atteintes portées aux droits de Lego.
Le 29 décembre 2020, la Haute Cour de Shanghai a rendu une décision finale contre 9 personnes accusées d’avoir participé à la reproduction, la fabrication et la commercialisation de jouets reproduisant les briques Lego, sous la marque Lepin.
L’affaire a débuté en avril 2019, lorsque la police de Shanghai a saisi des moules permettant de répliquer les briques Lego, des emballages de jouets de marque Lepin et leurs manuels d’assemblage, avant de saisir le Procureur de Shanghai. Retenant la contrefaçon de droits d’auteur, la Troisième Cour intermédiaire de Shanghai (Shanghai N.03 Intermediate People’s Court) a prononcé des condamnations à l’encontre des 9 accusés allant jusqu’à 6 ans d’emprisonnement et 90 millions de RMB (environ 11 millions d’euros) d’amende.
L’affaire révèle que depuis 2015, les contrefacteurs participaient à l’achat des briques Lego pour les assembler, désassembler, reproduire les moules de fabrication, et ensuite les fabriquer et les commercialiser sous la marque Lepin, bien entendu sans autorisation de la société Lego. Selon les éléments versés aux débats, le montant des ventes illicites réalisées par les contrefacteurs de 2017 à 2019 s’élèverait à 330 millions de yuans (environ 42 millions d’euros).
Selon le Comité du Copyright Protection Center of China (CPCC), les contrefacteurs avaient copié, non seulement les briques Lego elles-mêmes et leurs assemblages selon un thème donné (“Great Wall of China”, “The Flintstones”, “Disney Princess”, “ALL Terrain Tow Truck”, etc.), mais également d’autres éléments du jouet tels que l’emballage, les couleurs, ou les notices d’assemblage. Il s’agissait ainsi de répliques des jouets Lego, de moindre qualité, dont il résultait un risque de confusion évident.
La Haute Cour de Shanghai a confirmé la décision rendue en première instance. Elle rappelle que les briques Lego, en particulier lorsqu’elles sont assemblées, constituent des œuvres originales réalisées par Lego et protégées par le droit d’auteur chinois, étant rappelé que la Chine est partie à la Convention de Berne et à la Universal Copyright Convention depuis 1992, tout comme le Danemark, pays d’origine de la société Lego.
Selon les juges chinois, les produits contrefaisants avaient déjà envahi le marché, créant pour Lego non seulement un préjudice économique très grave mais aussi une atteinte à son image. De plus, de tels actes ont nécessairement perturbé l’ordre économique et porté atteinte à l’ordre public, ce qui justifiait une condamnation sévère des contrefacteurs.
Ce n’est pas la première fois que la société Lego agit contre les jouets de marque Lepin. En effet, Lego a déjà initié plusieurs procédures civiles contre le titulaire de cette marque (voir notamment notre article Litige en propriété intellectuelle: Lego construit sa stratégie en s’appuyant sur le droit d’auteur et les marques notoires), qui se sont cependant avérées insatisfaisantes. En dépit de condamnations prononcées par les tribunaux de cesser de porter atteinte aux droits de la société Lego, les contrefaçons Lepin continuaient à inonder le marché.
La condamnation prononcée par la Haute Cour de Shanghai devrait enfin avoir un effet dissuasif.
De manière plus générale, cette affaire rappelle que la protection par le droit d’auteur constitue pour les entreprises une arme efficace pour faire cesser la copie en Chine, même lorsqu’il est question d’un produit commercial s’éloignant des œuvres classiques, dès lors qu’il revêt un caractère original au sens du droit d’auteur.
Article rédigé par , Céline THIRAPOUNNHO