Comment s’y prendre avec les contrefacteurs de produits cosmétiques sur le marché chinois ?

Nous vous proposons cette semaine un article sur la gestion de la contrefaçon des produits cosmétiques en Chine. Cet article que nous traduisons en français a été initialement rédigé en anglais par le IPR Helpdesk.

contrefaçon de produits cosmétiques en ChineMalgré d’importantes améliorations des lois et réglementations relatives à la PI en Chine ces dernières années, la contrefaçon est encore monnaie courante dans ce pays, et les PME européennes qui souhaitent y travailler doivent mettre en place des stratégies de propriété industrielle solides si elles veulent réussir sur le marché chinois. Nous vous proposons de regarder de plus près les mesures que les PME européennes du cosmétique peuvent adopter, au-delà de l’enregistrement de leurs titres de propriété en Chine, pour minimiser les risques de contrefaçon.

Introduction

Comme toute société quel que soit son secteur économique, les sociétés cosmétiques ont tout à gagner d’une protection précoce de leur propriété industrielle. Déposer leurs titres auprès des autorités et douanes chinoises avant toute forme d’activité commerciale dans le pays peut potentiellement leur faire économiser beaucoup d’argent, car l’enregistrement des titres en Chine est la condition nécessaire pour établir un dossier solide contre des sociétés locales qui pourraient tenter de voler leur propriété industrielle. Néanmoins, de nombreux contrefacteurs potentiels passeront directement à la contrefaçon et commenceront à fabriquer des copies de produits pour tirer profit du travail assidu des PME. Dans ces cas, le dépôt précoce des titres n’est pas toujours suffisant. En complément du dépôt, les PME devraient également adopter des stratégies de lutte contre la contrefaçon fondées à la fois sur la dissuasion (rendre la contrefaçon extrêmement difficile à mettre en œuvre) et sur l’action offensive (collaborer avec les autorités pour mener des perquisitions et lancer des investigations pour faire cesser la contrefaçon).

Méthodes “douces” de prévention : déposer les droits de propriété industrielle, établir des veilles sur internet et éduquer les consommateurs

contrefaçon de produits cosmétiques en ChineLa prévention –arrêter les contrefacteurs avant qu’ils n’aient le temps de créer de faux produits–  devrait toujours être la première arme des PME dans la lutte contre la contrefaçon, qui peut éroder leurs marges et la bienveillance du public à leur égard. A cette fin, rien ne vaut l’enregistrement précoce de leurs titres. Le dépôt des marques, dessins industriels, brevets, etc. auprès des autorités chinoises compétentes peut offrir aux PME de puissants recours légaux en cas de contrefaçon. Pour les grands fabricants contrefacteurs, capables de sortir des milliers de produits contrefaits par jour, le risque d’une saisie par les agences administratives ou les douanes et de la condamnation à payer des dommages (ou d’effectuer des peines d’emprisonnement) par les Tribunaux populaires constituent un moyen considérable de dissuasion.

Une fois entrées sur le marché chinois, les PME devraient avoir en tête d’établir des veilles régulières sur les marchés notoires dans les villes importantes et sur les sites de vente en ligne afin de repérer d’éventuels produits contrefaits. La recherche périodique, sur place ou en ligne (en utilisant à la fois des mots-clés en chinois et en anglais), de produits identiques ou similaires à ceux d’une PME peut lui permettre d’attaquer les contrefacteurs avant que leur opération ne soit totalement mature.

Pour les sites de vente en ligne, la collaboration avec les grandes plateformes de vente en ligne telles que Taobao ou Sunning Yigou peut significativement améliorer l’efficacité des efforts de lutte. Ces plateformes sont généralement des alliées motivées car elles sont elles-mêmes responsables en cas de vente de produits contrefaits. Parmi ces sites, nombreux sont ceux qui disposent d’un service dédié à la lutte contre la contrefaçon et de mécanismes simplifiés de signalement. Parfois, la simple annonce d’un partenariat avec l’un de ces sites, parce qu’elle octroie à la PME un statut de cible difficile à atteindre, peut être suffisant pour décourager la contrefaçon.

Enfin, la connaissance des risques associés aux faux cosmétiques n’a cessé de se propager, des consommateurs avisés aux acheteurs ordinaires, grâce à la diligence des autorités chinoises dans les procédures de contrôle qualité et à la récente médiatisation de cas de contrefaçon notoires. Les consommateurs fidèles sont parfois prêts à tous les efforts pour s’assurer que les produits qu’ils achètent sont authentiques. Armer les consommateurs de matériel anti-contrefaçon, en chinois et de très bonne qualité, permet de leur apprendre à éviter les produits contrefaits, et redirige les ventes vers les véritables fabricants.

Méthodes « dures » de prévention : ériger des barrières anti-contrefaçon

Les méthodes présentées plus haut ciblent la distribution et les ventes des contrefacteurs. Qu’en est-il pour les emballages et bouteilles dans lesquels les cosmétiques sont stockés ? Comment les contrefacteurs ont-ils accès à ces derniers et comment peut-on les en empêcher ?

Fort heureusement, les produits ayant une forme distinctive sont plus facilement identifiables par les douanes et donc plus faciles à protéger. Néanmoins, aucune des méthodes mentionnées ci-dessus n’empêchera les contrefacteurs d’accéder à des emballages et bouteilles qui permettent aux produits contrefaits de tromper les consommateurs. Pour les en empêcher, les PME doivent comprendre d’où proviennent ces bouteilles et comment tarir ces sources.

Premier cas : certains contrefacteurs de petite taille peuvent ré-embouteiller les faux cosmétiques pour les vendre. En achetant les bouteilles usagées de véritables cosmétiques et les emplissant avec de fausses substances, les contrefacteurs peuvent obtenir des produits dont l’apparence extérieure est totalement conforme à l’originale et qui peuvent ainsi tromper les agents douaniers et toute personne qui ne recourt pas à des tests en laboratoire. La limite de cette approche est qu’il est difficile d’acquérir de telles bouteilles. Ces contrefacteurs peuvent donc rarement dépasser le stade de la petite échelle. Pour éviter ce type de contrefaçon, les marques peuvent incorporer au packaging extérieur de leurs produits des éléments relativement simples de sécurité, tels que des emballages scellés et distinctifs.

Autre possibilité : les fabricants locaux, qui n’auraient pas été soigneusement liés par des accords de confidentialité, non-utilisation et non-contournement (NNN), peuvent toujours produire des bouteilles et contenants supplémentaires pour les vendre à des contrefacteurs à prix réduit. C’est une pratique courante dans l’industrie pharmaceutique, mais elle existe également dans le secteur des cosmétiques. Dans ce cas, votre fournisseur devient un élément clef dans la chaine de production illicite. Pour empêcher ce type de contrefaçon, les PME peuvent soigneusement limiter le nombre de moules mis à disposition de leurs fournisseurs, contrôler la production ou même retirer les moules entres les cycles de production. Selon la taille et les ressources du fournisseur, toutes ces démarches peuvent être compliquées mais leur coût sera justifié par l’épuisement de la source de fausses bouteilles.

Enfin, des usines clandestines capables de produire les bouteilles et des emballages de manière autonome peuvent exister. Dotées d’actifs et de ressources humaines considérables, ces entreprises sont des cibles de choix pour les procédures administratives et l’octroi par les tribunaux de dommages-intérêts. Les PME doivent rapidement repérer les chaînes de distribution des faux cosmétiques afin d’identifier ces producteurs et collecter des preuves avant de frapper vite et fort. L’utilisation de systèmes complexes d’authentification (tels que certains codes vérifiés par des tiers, des étiquettes holographiques ou RFID) qui peuvent compliquer grandement le processus de production de biens contrefaits est une autre alternative.

Mesures coercitives

Une fois le contrefacteur identifié, une PME dispose de plusieurs pistes d’action. Les actions les plus rapides sont d’entamer une procédure administrative auprès de l’Administration d’Etat pour l’Industrie et le Commerce (SAIC),de l’Office Chinois de la propriété Industrielle (SIPO), de l’Administration Générale de la Supervision de la Qualité, de l’Inspection et de la Quarantaine (AQSIQ) ou encore auprès des douanes : l’autorité compétente peut rapidement entendre une affaire et statuer. Les experts du Helpdesk peuvent en témoigner : à plusieurs reprises, lorsqu’une PME a signalé de potentiels contrefacteurs aux autorités administratives compétentes, ces dernières ont dépêché un représentant dans les locaux de la PME dans l’heure. Les actions administratives ont toutefois comme désavantage le fait que ces autorités ne sont pas habilitées à octroyer des dommages.

Les PME peuvent également intenter des poursuites au pénal devant les Tribunaux populaires, même si ce type de sanction est généralement réservé à la contrefaçon de grande envergure et nécessite des preuves parfaitement solides (notariées). Les PME plus raisonnables s’orienteront vers un arbitrage, qui peut faire cesser la contrefaçon rapidement et à peu de frais (surtout celle des contrefacteurs de grande envergure qui ont plus d’actifs à perdre). Enfin, les procédures au civil entamées devant les Tribunaux populaires permettent de gérer les cas complexes hors de portée des tribunaux administratifs et permettent l’octroi de dommages et intérêts, même si les coûts et les délais nécessaires pour ce genre de procédure sont généralement conséquents.

Conclusion

Nonobstant leur nature illicite, les contrefacteurs ressemblent beaucoup aux entrepreneurs réguliers dans leurs activités de recherche de profit. Engager une procédure administrative ou civile afin d’altérer l’équilibre coût-bénéfice des contrefacteurs permet souvent de faire cesser la contrefaçon lorsqu’elle est exercée par des producteurs de taille significative. Le contrôle strict de la production de produits et d’emballages, ainsi que la création d’emballages difficiles à imiter, peuvent également compliquer le processus de contrefaçon. En complément d’un enregistrement minutieux et précoce des droits de PI, ces stratégies de long-terme peuvent asphyxier la contrefaçon et augmenter les flux de recettes pour les PME responsables actives sur le marché chinois.

Article rédigé par Samuel Sabasteanski du China IPR SME Helpdesknom de domaine

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Traduit de l’anglais vers le français par Kenya Tillerson, du cabinet LLRLogo LLR